Salut mes jeunes gastéropodes,
A la rédaction de cet article, nous sommes à la saison des pluies. Un moment où rafales et avalanches d’eaux s’attardent bien aisément sur nos îles pour apporter abondance aux plantes mais aussi nombreux soucis aux humains venus vivre sur ces terres. Entre destructions, éboulements, coulées de boue et maisons emportées par les torrents de la rivière déchaînée, la Nature nous rappelle avec force notre petitesse dans ce monde auquel nous avons trop tendance à croire qu’il nous appartient.
Mais nous ne sommes pas ici pour ramener à l’ordre notre humanité qui s’avère être (et l’a toujours été), une poussière dans l’univers. Aujourd’hui, parlons littérature, culture et tout particulièrement la culture et l’Histoire hakka. Cette partie de chinois qui font corps avec le décor et les stéréotypes de nos îles. Laissons-nous donc emporter par les écrits de Jimmy Ly avec son recueil « Histoires de feu, de flamme et de femmes ».
En 3 points → Hakka, mémoire, péripéties
ANATOMIE DE L'OUVRAGE
« Histoires de feu, de flamme et de femmes » est un recueil de nouvelles qui transpire les souvenirs, rythmé par quelques esquisses d’ombres réalisées par Jean Charles Hyvert à chaque début d’histoires. Des illustrations qui permettent de donner une première ponctuation avant même d’entamer la lecture. De même que quelques citations posées ci et là offrent des indices complémentaires au sujet des histoires à venir.
Ce sont des histoires de vie (d’une époque révolue et pourtant sur certains détails, des choses sont encore d’actualité), des témoignages (parfois tournés de manière fictive ou adaptés pour une meilleure rédaction), la mémoire d’une époque, (le “avant avant” lorsque l’on envoyait les filles venant de Chine sur un bateau dans une traversée incertaine pour rejoindre un mari qu’elle ne connaît pas) et bien d’autres épisodes qui font rire, pleurer, étonner, vibrer. Il se plaît également à dénoncer, à se moquer (et ce, bien joliment !), à dire clairement ce qu’il pense mais toujours avec un tact de velours.
Pour ma part, j’ai eu grand plaisir à découvrir un gros panel de vocabulaire qui fait frétiller mes papilles de littéraire introvertie. J’avoue toutefois que je n’ai pas terminé la dernière nouvelle car il y a tout de même beaucoup d’aller-retour sur des anecdotes dans une même histoire et je pense que ça commençait à me fiutiser progressivement bien qu’il s’agisse d’une approche pour recontextualiser une époque avec des détails, des références musicales, cinématographiques ainsi que de lieux, etc.
Finissons enfin cette grande présentation du corps de ce livre avec ce fait qu’il s’agisse d’une auto-édition, publiée en 2006.
DES PRÉLIMINAIRES EN ÉMOIS
Débutons nos extraits avec du fort, du vrai et du tristement historique.
« Avec ce mariage, tu nous soulageras d’autant plus que tu ne nous coûteras plus rien, puisque c’est comme si nous t’avions vendue à quelqu’un d’autre qui subviendra à tes besoins. Pense un peu à ton père qui est très fatigué et qui a bien du mal à joindre les deux bouts. »
Mais il n’y a pas que des choses moroses qui donnent du gris aux pensées. Quelques teintes d’humours basés sur des réalités, nous font agréablement sourire par l’actualité des propos.
« C’est si difficile pour les jeunes Chinois d’aujourd’hui d’avoir une vie personnelle qui ne se déroule pas sous l'œil scrutateur de tous les voisins et à la merci de leurs commentaires insidieux et quelquefois désobligeants. »
Continuons avec ma pépite préférée, si vrai encore, car je les vois également. Et gare aux jeunes gens qui critiquent et nient, car certains tendent dangereusement à ces airs et à cette allure malgré la modernité de leurs idées :
« Vêtus de leurs crasseux tricots débardeurs de Hong Kong, ils ont l’air si sournois avec leurs yeux qui la regardent ou la scrutent comme une bête curieuse ! Ils sont toujours en train de se plaindre de je ne sais quoi avec ce regard oblique, bridé et fuyant, qui se cache et ne se devine qu’à travers la fumée de leurs cigarettes malodorantes, pendouillant de leurs lèvres gercées. »
Nous avions parlé également de références, alors partons dans une mise en abîme en évoquant une ici :
« Le morceau interminable a pour nom “Hey, Jude” qui dure, chrono en main, six minutes et quarante trois secondes, grésillement vinylique du début compris. Pas étonnant qu’il soit leur préféré. Si à la fin de la musique, tu n’as pas encore emballé la marchandise, c’est que tu n’es qu’un séducteur de pacotille tout juste bon à inviter les filles les moins gâtées qui font tapisserie dans l'obscurité protectrice des bancs situés dans les profondeurs de la salle. »
Difficile de ne pas terminer avec les historiques et fantasmagoriques combats de coqs, grand secret de polichinelle que tout le monde apprécie de manière cachée ou dévoilée.
« En général, les confrontations se déroulaient toujours dans le jardin de l’un deux, assez grand et ombragé pour servir de gallodrome, mot bien trop savant pour dire ring de combat pour des volatiles boxeurs, de la catégorie des poids coq bien entendu. »
UN METS POUR QUELLE DILETTANTE
Le recueil de nouvelles « Histoires de feu, de flamme et de femmes » est une œuvre qui sied aux adolescents ayant de la curiosité pour leur culture hakka ou cette culture qu’ils ne connaissent pas mais avec laquelle ils cohabitent. Je tiens à préciser toutefois qu’il faut s'accrocher à cette lecture car, si l’on n'est pas habitué à lire, de part cette manière d’écrire particulière mais aussi par le vocabulaire utilisé, cela peut être un peu déroutant au premier abord. Toutefois, ces premières contraintes (si nous pouvons les nommer ainsi) sont en réalité un enrichissement à la fois historique et culturel. De même qu’à la fin de chaque histoire, une annotation de la part de l’auteur précise si ce sont des histoires vraies ou fictives.
Assurément les adultes se laisseront porter par ces souvenirs ou cette découverte culturelle, bien que les goûts peuvent dépendre du genre de lecture que nous sommes.
LY, Jimmy M. Histoires de feu, de flamme et de femmes. Auto-édition, 2006
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